quinta-feira, 17 de fevereiro de 2011

Para quem não lê português, mas lê francês.

JOÃO CROCO


J’ai retrouvé ce matin des lettres, pieusement conservées, de mon ami João de Azevedo. Elles m’étaient envoyées de Rome, où il vivait dans les années 70. Et à les relire, j’en éprouve, sinon de la culpabilité, en tous cas de l’irritation contre moi-même. C’est que, dans la joyeuse confusion où l’un et l’autre nous barbotions, il me semble que je n’ai pas su identifier alors son désir le plus puissant. Et pourtant ! Combien de fois dans ces lettres n’en est-il pas question ! Peindre, dessiner, graver, il ne le cache pas, le rend heureux. Mais jamais il ne se laisse aller à dire qu’il pourrait s’y consacrer pleinement. Les idéaux politiques trop surmoïques de notre jeunesse ne le permettaient pas. La voie lui était pourtant ouverte ; des galeristes et des collectionneurs s’intéressaient à son travail, qu’il s’interdisait de considérer dans une autre perspective qu’alimentaire.

Cela m’irrite, oui, de saisir à présent combien il s’est ainsi censuré. Mais en vérité, c’est dès l’adolescence que le conflit se fait jour. João rêve alors d’entrer à l’Académie des Beaux-Arts de Lisbonne, contre le vœu paternel de le voir entreprendre des études d’ingénieur naval. Ce ne sera ni l’une ni l’autre voie. Après un cours passage d’une année à la faculté de droit, il fuit
à 18 ans la dictature de Salazar, et demande l’asile politique en Belgique, où commence une autre histoire. L’existence qu’il mena ensuite fut riche, généreuse, inventive. Mais il est temps que sans réserve, il puisse maintenant jouir de ses pinceaux et donner la pleine mesure de son talent.

Lui-même l’a compris, j’en suis ravi. Le tournant s’est fait à Timor, où il séjourna deux années, de 2005 à 2007. Dans cette île à la forme étrangement semblable à celle du crocodile, il s’est passionné pour les légendes locales et le rapport très intense que les Timorais entretiennent avec la figure totémique du crocodile. En a résulté une série de peintures aux couleurs éblouissantes où l’homme et le saurien se croisent à la manière d’un centaure inversé.

De même que chez Pablo Picasso la rencontre de l’homme et du taureau – on songera en particulier à la série de tableaux consacrés au Minotaure -, celle de l’homme et du crocodile célébrée par João de Azevedo est de nature puissamment érotique. Inquiétante aussi : est-il figure plus évocatrice de la castration que celle du crocodile ? Demandez donc au capitaine Hook ce qu’il en pense !
Mais pour l’être parlant, il se trouve que la castration est au cœur même de l’économie du désir. Dans son séminaire « La Relation d’objet », Jacques Lacan évoque d’ailleurs le crocodile pour illustrer la jouissance maternelle dévoratrice, et du phallus il fait le bâton prestement dressé entre ses deux mâchoires pour les empêcher de se refermer ! Je ne sais ce que les Timorais penseraient de cet apologue !

Au Mozambique où João travailla onze années, un peintre célèbre se nomme Malangatana N’Guenha, c’est-à-dire Malangatana Crocodile. A Timor, il devint en quelque sorte João Croco !


Yves Depelsenaire
22/7/2010

2 comentários:

  1. Bonjour,
    Une amie de Jeanne Férieu, dont j'aime le travail. Nous collaborons avec Jeanne dans la conduite de notre galerie d'art et de culture à Saint-Denis près de Paris (Nous avons aussi travaillé avec le Mali)
    Je suis psychanalyste ( cf Yves Delpensenaire)
    Nous découvrons votre travail et votre approche du monde;nous aimerions le montrer en septembre octobre quand il y a encore du soleil et les portes ouvertes et à travers votre oeuvre au sens large toucher le plus possible la population de Saint-Denis qui est la plus métissée et modeste voir nécessiteuse du nord de Paris. Jeanne nous dit que vous avez déposé des oeuvres à La Menuiserie dans cette perspective.
    Dites-nous ce que vous en pensez, évidemment nous aimerions que vous veniez. Nous pouvons bien sûr vous loger dans un studio. Dites-nous.
    Félicitations
    Jeanick Suzanne Hubert pour HCE

    Jeanick hubert et Georges Quidet
    HCE Studio Galerie ( HCE HERE COMES EVERYBODY)
    7 rue Gibault
    93200 Saint-Denis
    0620789154
    studiohcecreation@gmail.com

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